Amnistiés, Hervé, Almereyda, Merle, reviennent à Paris. Et c’est la Guerre Sociale qui fait son apparition. Encore une fois, la place nous manque pour narrer par le menu les péripéties du journal. Almereyda a, d’ailleurs, raconté ces choses de façon fort amusante dans l’Almanach de la Guerre Sociale pour 1911.
Avec la Guerre, ce furent naturellement les poursuites et les condamnations. Notons : outre les trois ans de prison récoltés avec l’affiche rouge, Almereyda a encore recueilli 8 jours pour avoir manifesté contre le roi d’Espagne ; six semaines pour avoir manifesté à la revue du 14 juillet 1907 ; 3 ans pour des articles sur le Maroc et les massacres du Midi ; six mois, tout dernièrement, au moment de la grève des cheminots. Et ce n’est pas fini. Avec les « Jeunes Gardes », il est probable qu’Almereyda aura, de nouveau, l’occasion de revoir sa cellule de la Santé ou de Clairvaux.
Tel est le militant. On sait le reste. On sait quels furent les débuts de ces « Jeunes Gardes », organisés pour reprendre la rue contre les braillards nationalistes, aussi bien que pour la disputer aux cosaques de Lépine. On ne sait pas encore avec quelle méthode et quel souci les « Jeunes Gardes » sont dirigés, conduits au combat. Il ne nous appartient pas de divulguer ici ces méthodes. Mais on pourra voir, par la suite, quelle force représente cette jeune organisation, quand elle sera entrée en plein dans la période de l’action.
Qu’ajouter ? D’anarchiste et de révolté, Almereyda, plus conscient des nécessités de l’heure, est devenu un modèle de révolutionnaire organisateur, presque militaire, comme son « général », Gustave Hervé. Grâce à lui, à son goût, à son amour du métier de journaliste, la Guerre Sociale a pu prendre un essor inouï. N’allez pas croire, pourtant, que Miguel Almereyda est une sorte d’illuminé, n’ayant d’autre but que la Révolution et le chambardement. C’est aussi un esprit cultivé, un lettré qui ne dédaigne ni les « premières » ni les « vernissages » et s’habille avec quelque recherche élégante. Ce qui prouve, une fois de plus, que pour être révolutionnaire on n’est pas forcément un sauvage ou un forcené.