Le 2 avril 1916, Sébastien Faure lance avec l’aide de Mauricius le premier numéro de Ce qu’il faut dire. Cet hebdomadaire pacifiste de 4 pages grand format va atteindre assez rapidement, en pleine Première Guerre mondiale, un tirage de 20 000 exemplaires et 2 000 abonnés. Il paraîtra pendant deux ans, sauf une suspension de deux mois (juillet-août 1917) imposée par la censure, jusqu’à sa suspension définitive fin décembre 1917.
Après le déclenchement des hostilités, Sébastien Faure ne reste pas inactif : en janvier 1915, il fait imprimer clandestinement et diffuser un manifeste ayant pour titre « Vers la paix ». Ce texte, largement répandu sur le front, décide le ministre de l’Intérieur, L.-J. Malvy, à convoquer son auteur et à lui mettre en main un ignoble marché. Ou il cesse la diffusion ou les lettres de soldats manifestant leur approbation, saisies par la censure, seront remises à la justice militaire avec toutes les conséquences que cela pouvait entraîner.
« Sébast » renonce donc à cette forme de propagande et ronge son frein jusqu’au 14 juin 1915 où il tire un tract, « La Trêve des peuples », qui préconise une grève générale internationale pour le 1er août 1915. Le résultat fut hélas pratiquement nul.
Pas découragé, il crée alors au début d’avril 1916, CQFD. Le journal sera constamment victime des caviardages de la censure, mais ce n’est pas tant l’impact des articles dont le ton se devait d’être mesuré que son rôle de point de ralliement des opposants à la guerre qui sera important. Un témoin de cette époque affirme que, de juin 1916 à juillet 1917, 46 groupes d’Amis de Ce qu’il faut dire furent constitués en province et à Paris
. En juillet 1916, est publié également par l’imprimerie coopérative La Fraternelle, gérée par Sébastien Faure, un manifeste s’adressant « Aux femmes ».
Le 28 février 1917, le général Nivelle écrivait au ministre de la Guerre : Depuis plus d’un an, des tracts, brochures, journaux pacifistes parviennent aux armées. Il en sévit maintenant une véritable épidémie. (...) Ces tracts émanent du Libertaire, du Comité pour la reprise des relations internationales, du Comité de défense syndicaliste, de la Fédération des métaux, du Syndicat des instituteurs, de l’anarchiste Sébastien Faure principalement.
Même si les militaires ont intérêt à surestimer cette propagande pour renforcer leur autorité, elle peut avoir été un facteur de déclenchement parmi d’autres des mouvements de mutinerie qui vont agiter l’armée française en mai.