LA COMMUNE LIBRE :
La commune peut aussi bien être une agglomération de quelques centaines d’habitants qu’une cité vaste et populeuse.
Aujourd’hui, elle est représentée par son conseil municipal.
Du fait qu’elle élit elle-même son conseil municipal et qu’elle règle certaines questions touchant à la vie publique, elle peut, pour des esprits peu curieux, donner l’impression d’être vraiment l’expression de la volonté populaire. D’ailleurs, en apparence, elle jouit d’une certaine indépendance par rapport à l’État. Mais ce n’est là qu’une fiction.
En effet, si la municipalité est élue par la population (et encore faut-il préciser qu’il ne peut s’agir que d’une partie de la population), il n’en est pas moins vrai que l’État, par l’autorité accordée au préfet, exerce sur la commune le contrôle le plus absolu. Car le préfet dépend du ministre de l’Intérieur, et ce dernier se confond avec le gouvernement.
La police municipale, elle-même, peut très bien avoir à exécuter des ordres en contradiction formelle avec les vœux de la population.
L’indépendance communale est donc purement fictive.
Notre révolution, après avoir détruit l’État et fait disparaître tous les organes qui en sont l’expression (depuis le commissariat de police jusqu’au gouvernement), permettra à la commune de s’organiser elle-même, en dehors de tout pouvoir central. C’est alors que surgira, au sein des masses populaires, la « Commune libre ».
Pour la délimitation d’une commune, il sera tenu compte de la densité de la population, de sa position, de la configuration du terrain et, en général, des commodités.
Lorsqu’il s’agira d’une commune rurale, celle-ci se composera souvent de peu d’habitants, mais elle aura tout de même son Conseil communal. Car il ne saurait être question, un seul instant, que les aspirations réelles d’une certaine population soient résolues par une population voisine.
Par contre, la commune urbaine verra souvent son étendue déterminée par sa densité populaire.
Pour permettre à la population d’une grande ville de s’exprimer clairement, il sera nécessaire d’éviter que la commune dépasse un certain nombre d’habitants.
En sorte que, dans une grande agglomération, il y aura plusieurs communes qui, par l’intermédiaire de leurs délégués, constitueront un conseil intercommunal qui aura à se réunir pour certaines questions intéressant toutes les communes de l’agglomération. (Par exemple, les transports locaux, l’éclairage, les égouts, etc.)
Dans une ville comme Paris, aujourd’hui divisée en vingt arrondissements, il n’y aura plus que des communes administrées selon les mêmes principes que toutes les autres.
Périodiquement, la population se réunira et choisira son conseil communal pour une durée déterminée. Jeunes et adultes, hommes et femmes, participeront auxdites assemblées.
Contrairement à celle d’aujourd’hui, qui ne se réunit qu’à date fixe (en France, tous les quatre ans), la commune libre pourra se réunir à tout moment, sur la demande des habitants, pour traiter des questions urgentes et nécessaires, ou pour toute révocation jugée utile au sein de leur conseil.
Suivant toujours les mêmes principes qui ont présidé à la constitution des coopératives et des conseils d’entreprises, les représentants des conseils communaux constitueront, dans une même région, la « Fédération régionale des communes ».
Celle-ci sera délimitée, pour faciliter ses rapports avec la production, par l’étendue de la « Fédération régionale de production ».
A leur tour, enfin, les Fédérations régionales de communes constitueront, par leurs délégués, le « Conseil interrégional des communes », et ce dernier englobera tout le territoire.
Ce fédéralisme communal représente une méthode d’organisation et de représentation totalement en dehors de l’État. Et la population sera maîtresse absolue de tous les grands services publics dont elle fera usage. C’est en effet, par l’organe de la commune et au moyen de leurs associations d’usagers que les habitants feront connaître leurs besoins.
Pour toute question dont la solution ne dépassera pas le cadre communal (habitation, voirie, etc.), les membres de la commune décideront des travaux à faire.
Pour tel service embrassant une superficie égale à plusieurs communes (chemins, transports en commun, etc.), les communes intéressées, rurales ou urbaines, décideront en commun.
Et ainsi de suite. Les services intéressant une région seront décidés par la Fédération régionale intéressée. Les services intéressant la totalité du territoire, par le Conseil interrégional des communes. Ainsi la volonté de tous les usagers sera respectée.
Aujourd’hui, les grandes réalisations de toutes sortes sont, presque toujours, dictées par des soucis électoraux ; ou bien alors elles sont le résultat d’opérations financières profitables seulement à quelques entrepreneurs ou « élus du peuple ».
L’opposition fondamentale qui existe entre notre mode d’organisation et celui de tous les États apparaît clairement.
Pour éviter de nous répéter, nous disons dès maintenant que, soit qu’ils ressortent de la commune, de la fédération régionale ou de l’union des fédérations régionales, tous les services publics dont il va être question maintenant, qu’ils soient soumis au contrôle de l’un ou l’autre de ces organismes, seront « administrés » par les organismes de « production » responsables.