Durant la guerre eut lieu une grave pénurie de vivres. Le pain et les aliments de base furent rationnés. Dans plusieurs villes eurent lieu des révoltes causées par la faim. Les travailleurs réclamaient la réduction des prix alimentaires et la mise à disposition des terres communales pour la culture de pommes de terre. A Stockholm, ils manifestèrent pour le « Parlement de la rue ». Après la chute du régime tsariste en Russie, l’agitation atteignit son point culminant. Les éléments conservateurs organisèrent un corps de sécurité dont le quartier général était à l’école supérieure militaire. Ceci alarma la gauche extra-parlementaire. A la Maison du peuple, des soldats fraternisèrent avec les ouvriers. Des marins dirent qu’ils refuseraient d’obéir s’ils devaient marcher contre des manifestations de travailleurs. Le 1er mai 1917 fut attendu avec espoir et inquiétude. Cent mille opposants à la guerre vinrent à la manifestation, mais tout se passa dans le calme. Les masses ne montèrent pas à l’assaut du Château, la police et l’armée se tinrent en arrière. La Suède, ce pays sans tradition révolutionnaire, tenait déjà à atteindre le progrès par la voie évolutive.
Durant ces journées, Stockholm eut des hôtes de choix. Lénine arriva de Suisse avec ses compagnons. Nous leur réservâmes un accueil enthousiaste. Comment pouvions-nous deviner les talents de dictateur que le chef des bolcheviks réservait au fond de son cœur pour le peuple russe ! L’espoir du gouvernement Impérial allemand que les marxistes russes concluraient la paix avec lui s’accomplit. Il ne pensait pas que la révolution pouvait aussi fondre sur lui-même... De son exil londonien arriva aussi Pierre Kropotkine avec sa femme et sa fille. C’était là les personnalités les plus marquantes parmi tous ceux pour qui Stockholm constituait la première étape du retour vers leur patrie libérée de l’autocratie tsariste.