Voici ce qui se passait alors en Espagne. Le révolutionnaire Sempau venait d’être condamné à mort par un conseil de guerre pour attentat contre le lieutenant de gendarmerie Portas, chef des bourreaux de Montjuich. Les camarades résolurent de le faire évader. Il s’agissait aussi de délivrer un autre révolutionnaire. Malato arriva à Barcelone, se joignit aux conspirateurs. Ils réussirent à passer aux prisonniers une corde à crochets, deux fausses clefs, deux revolvers, 50 cartouches et de l’opium. Malheureusement ceux-ci furent trahis. Ils s’étaient confiés à un codétenu avec lequel ils se disputèrent et qui les dénonça l’avant-veille de la nuit fixée pour l’évasion. Les deux prisonniers furent mis au cachot et il devint impossible de tenter une nouvelle évasion. Plus tard, la condamnation à mort de Sempau fut cassée il fut jugé aux assises et acquitté. Il est aujourd’hui libre, marié et... assagi. Le traître Pelat a été poignardé. Quant aux conspirateurs du dehors, ils réussirent à échapper à la vigilance policière.
Là-dessus, la guerre éclata avec les États-Unis. On s’attendait à des défaites et à un soulèvement commençant à Valence. Malato partit pour cette ville. Il y eut, en effet, deux jours d’émeute. Mais les politiciens républicains avaient peur d’une révolution sociale. Ils ne voulaient que d’une révolution militaire. Salmeron était en pourparlers, pour un pronunciamento avec le général Weyler qui le joua. Le mouvement fut enrayé.
Malato se dirigea alors vers Carthagène où une révolte venait de se produire. Mais là il ne trouva guère que des querelles d’écoles entre individualistes et communistes. Les camarades ne songeaient que fort peu aux événements. Malato s’efforça de les faire descendre de la lune sur terre sans y réussir. Il se résolut alors à quitter l’Espagne. Au moment où il abandonnait Cartagène, la poudrière du fort San Juliano, une des défenses de la ville, explosait avec le gouverneur et 120 hommes mis hors de combat. C’était le dernier acte de guerre sociale en Espagne.