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La vie d’Anselmo Lorenzo en Bande dessinée [03]

jeudi 6 avril 2023

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Il est curieux de remarquer que la majeure partie des fondateurs de la Section Espagnole de la Première Internationale — plus tard Fédération Régionale Ouvrière Espagnole — comme de la célèbre Section madrilène de Typographes de l’Internationale — de laquelle naquît l’Union Générale des Travailleurs — étaient des ouvriers typographes. Pablo Iglesias, fondateur de l’UGT et du Parti Socialiste Ouvrier Espagnol, comme Lorenzo, était un typographe. A l’époque, le prolétariat des imprimeries possédait un niveau culturel au-dessus du reste de la classe ouvrière. Il était normal qu’y soient recrutées les élites idéalistes et dirigeantes.
Lorenzo est délégué par la Section espagnole pour représenter l’Espagne à la Conférence internationale célébrée à Londres au mois de septembre 1871. Au cours de cette réunion, il a l’occasion de faire la connaissance de Marx et d’Engels. Cette conférence devait être le prélude à la division de l’Internationale. Les différences d’interprétation qui séparaient socialistes anarchistes et socialistes démocrates y éclatèrent avec violence. Théoriquement, la division portait sur les deux interprétations du problème de base que l’on discutait : utilisation ou non utilisation de l’arme politique ; la prise ou la destruction du Pouvoir en tant qu’objectif révolutionnaire.

Le recul de l’histoire nous fait mieux voir la part que prirent, dans cette division, le tempérament et l’excès de personnalité de Marx et de Bakounine. Tous deux sont passionnés, obstinés, et déploient l’un comme l’autre une activité vraiment diabolique. Si Bakounine envoie en Espagne Fanelli avec une mission officielle et une mission secrète, Marx le fait aussi pour l’Allemagne, l’Amérique du Nord et l’Angleterre, sans négliger pour autant les relations avec les pays où il a une influence moindre : l’Italie, la Suisse, la Belgique, l’Espagne, la France, la Russie.
L’écho de cette lutte dans l’Internationale arrive en Espagne. Il a des résonances dans les séances du Conseil Fédéral et dans les réunions de la Fédération, avant même le voyage de Lafargue en Espagne. Lorenzo profite de son séjour à Londres pour rendre visite à Karl Marx et lui demander de ne pas provoquer de scission dans la Section espagnole, où il s’efforce de se développer une organisation très forte. Marx sait très bien l’influence morale de Lorenzo en Espagne. Un accueil charmant et chaleureux attend le jeune homme chez Marx. Celui-ci va faire en son honneur de grands frais de séduction.

Lorenzo se trouve accueilli au sein d’une famille juive qui sait être très attachante, lorsque l’invité en vaut la peine. Longtemps il garde le souvenir de sa visite. Quelques mois plus tard, quand, à Madrid, il fréquente les Lafargue — réfugiés en Espagne pour fuir la répression menée contre la Commune en France et pour accomplir la mission que Marx, profitant de l’occasion, leur a donnée : organiser un groupe d’amis qui, plus tard, devait de venir le Parti Socialiste Ouvrier Espagnol et l’UGT — Laura Lafargue, fille cadette de Marx, lui inspire une admiration passionnée.
Lorenzo, malgré l’envoûtement exercé par les Marx sur lui, parle franchement à Karl, en son nom et au nom du Conseil Fédéral, et lui demande d’abandonner ses projets. Marx l’écoute avec attention d’abord, mais le submerge ensuite sous un flot d’éloquence, exhalant ses griefs et sa rancune. Il accuse Bakounine d’intriguer au sein de l’Internationale, menant une politique personnelle et revendique le droit qu’il a d’organiser, là où il le pourra, une force en accord avec ce qu’il pense correspondre le mieux aux intérêts du Parti qu’il est en train de créer internationalement.

A suivre

 

Cette BD est issue de Espoir, le journal de la CNT-AIT de Toulouse de 1962. Elle a fait l’objet d’une réédition en brochure publiée en 2006 par Perspective libertaire CNT-AIT, et une nouvelle édition enrichie est prévue prochainement.

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