Une métaphore nouvelle soutient la pensée en évoquant une image visuelle, tandis qu’une métaphore qui est « morte » (par exemple iron resolution, fermeté d’acier) a en fait régressé jusqu’à devenir une expression ordinaire si bien qu’en général on peut l’utiliser sans diminuer la vivacité du style. Mais entre ces deux groupes il y a un immense réservoir de métaphores usées jusqu’à la corde qui ont perdu tout pouvoir évocateur et qui ne servent qu’à s’épargner la peine de trouver des tournures par soi-même. Quelques exemples : se tenir au coude à coude, placer entre les mains de, pêcher en eaux troubles, à l’ordre du jour, talon d’Achille, chant du cygne, etc. Pour beaucoup d’entre elles, leur utilisateur ignore le sens d’origine (...), et des métaphores incompatibles sont fréquemment mêlées, indice certain que l’auteur se moque de ce qu’il dit. Quelques métaphores courantes aujourd’hui ont été détournées de leur sens d’origine, sans que leurs utilisateurs s’en doutent le moins du monde. Par exemple toe the line [s’aligner] est parfois orthographié tow the line [remorquer la ligne !].
Autre exemple : le marteau et l’enclume, aujourd’hui utilisé pour dire que l’enclume est en position défavorable. Dans la vie courante, c’est presque toujours l’enclume qui brise le marteau, jamais l’inverse : un écrivain qui prendrait le temps de réfléchir à ce qu’il dit s’en apercevrait, et se garderait de pervertir l’expression d’origine.