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Pour l’anarchisme - Que font les anarchistes ?

samedi 14 janvier 2023, par Nicolas Walter (CC by-nc-sa)

La première chose que font les anarchistes, c’est penser et parler. Peu de gens sont anarchistes de naissance, et c’est une expérience troublante de le devenir, qui implique un considérable bouleversement émotif et intellectuel. Un anarchiste conscient est toujours dans une situation difficile (à peu près, disons, comme un athée dans l’Europe médiévale) ; c’est difficile de franchir les barrières de la pensée et de persuader les gens que la nécessité du gouvernement (comme l’existence de Dieu) ne va pas de soi, mais peut être mise en question et même rejetée. Un anarchiste doit élaborer complètement une nouvelle vision du monde et une nouvelle manière d’y agir ; cela se fait en général dans des conversations avec des gens qui sont anarchistes ou proches de l’anarchisme, particulièrement dans des groupes ou des activités de gauche.

D’ailleurs, même l’anarchiste le plus dogmatique a des contacts avec des non-anarchistes, et ces contacts sont inévitablement autant d’occasions de diffuser ses idées. Dans sa famille, avec ses amis, chez lui, au travail, tout anarchiste qui n’est pas uniquement « philosophique » est forcément influencé. Sans que ce soit absolu, les anarchistes sont en général moins ennuyés que les autres gens par des problèmes tels que la fidélité de leur conjoint, l’obéissance de leurs enfants, le conformisme de leurs voisins ou la ponctualité de leurs collègues. Les employés et les citoyens anarchistes aiment moins faire ce qu’on leur dit, et les enseignants et les parents aiment moins obliger les autres à faire ce qu’ils leur disent. Un anarchisme qui ne transparaît pas dans la vie privée n’est pas vraiment digne de confiance.

Il suffit à quelques anarchistes d’avoir leurs idées et de limiter leurs opinions à leur propre vie, mais la plupart veulent aller plus loin et influencer autrui. Dans des discussions sur des problèmes sociaux ou politiques, ils amènent le point de vue libertaire, et dans les luttes publiques ils défendent la solution libertaire. Mais, pour avoir un impact réel, il faut travailler avec d’autres anarchistes ou dans un groupe politique qui ait une base plus permanente que la Simple rencontre au hasard. C’est le commencement de l’organisation, qui mène à la propagande et finalement à l’action.

L’organisation et la propagande

La forme initiale de l’organisation anarchiste est le groupe de discussion. S’il se révèle viable, il se développera dans deux directions — il créera des liens avec d’autres groupes, et il élargira son champ d’activité. Les liens avec d’autres groupes peuvent finalement mener à une espèce de fédération qui coordonnera les actions et en entreprendra de plus ambitieuses. L’activité anarchiste commence normalement par de la propagande pour amener à l’idée anarchiste de base. Il y a deux façons principales de le faire — la propagande par la parole et la propagande par le fait.

Us mots peuvent être écrits ou dits. Aujourd’hui, les discours sont moins entendus qu’autrefois, mais les réunions publiques — en salle ou à l’extérieur — restent une bonne méthode pour atteindre directement les gens. Le stade final, lorsqu’on devient anarchiste, est normalement hâté par des contacts personnels, et une assemblée peut en fournir l’occasion. Autant qu’à des assemblées spécifiquement anarchistes, il vaut la peine d’assister à d’autres réunions pour y amener le point de vue libertaire, en prenant part aux discours ou en les interrompant.

Le véhicule de la parole le plus perfectionné aujourd’hui est évidemment la radio et la télévision. Mais ce sont des moyens de propagande assez peu satisfaisants, car ils ne sont pas faits pour communiquer des idées peu familières ou expliquer des positions politiques. L’anarchisme passera plus efficacement à la radio si on raconte une histoire dont on suggère la morale. C’est vrai aussi d’autres moyens de diffusion comme le cinéma ou le théâtre, par lesquels des personnes douées peuvent faire une propagande extrêmement efficace. En général, cependant, les anarchistes n’ont pas su utiliser ces moyens comme on aurait pu le souhaiter.

De toute façon, aussi efficace que soit la propagande par la parole, les écrits sont nécessaires pour compléter le message, et c’est la forme de propagande, hier comme aujourd’hui, la plus fréquente. L’idée d’une société sans gouvernement a pu exister de façon souterraine pendant des siècles et émerger occasionnellement dans des mouvements populaires radicaux, mais ce sont des écrivains comme Godwin, Proudhon, Stirner qui l’ont pour la première fois fait connaitre à des milliers de lecteurs. Et lorsque l’idée prit racine et s’exprima dans des groupes organisés, alors on vit paraitre ce déluge de journaux et de brochures qui reste le principal moyen de communication dans le mouvement anarchiste. Certaines de ces publications furent excellentes ; la plupart furent plutôt médiocres ; mais elles ont été essentielles pour affirmer que le mouvement ne se repliait pas sur lui-même mais maintenait un dialogue constant avec le monde extérieur. Une fois de plus, autant que de produire des œuvres spécifiquement anarchistes, il vaut la peine de contribuer à d’autres périodiques et d’écrire d’autres livres pour proposer un point de vue libertaire à des lecteurs non anarchistes.

Mais les mots, dits et écrits, même nécessaires, ne suffisent jamais. Nous pouvons parler et écrire en termes généraux autant que nous voulons, cela ne nous mènera à rien de soi-même. Il faut donc aller au-delà de la simple propagande de deux manières — en discutant des problèmes particuliers au bon moment et d’une manière immédiatement efficace, ou en attirant l’attention par quelque chose de plus spectaculaire que de simples paroles. La première manière est l’agitation, la seconde la propagande par le fait.

L’agitation est le lieu où la théorie politique affronte la réalité politique. L’agitation anarchiste est utile lorsque les gens sont particulièrement réceptifs à ce qu’elle propose à cause d’une tension dans le système étatique — pendant des guerres civiles ou nationales, des campagnes contre l’oppression ou des scandales publics —, et elle consiste essentiellement en une propagande ramenée sur terre et rendue réalisable. Dans une situation où la prise de conscience est rapide, les gens ne s’intéressent pas tant à des spéculations générales qu’à des propositions spécifiques. C’est l’occasion de montrer en détail ce qui est faux dans le système actuel et comment l’améliorer. L’agitation anarchiste a parfois été efficace, en particulier en France, en Espagne et aux États-Unis avant la première guerre mondiale, en Russie, en Italie et en Chine après la première guerre, en Espagne dans les années 30.

L’idée de la propagande par le fait est souvent mal comprise, tant par les anarchistes que par leurs adversaires. Lorsque cette expression fut utilisée pour la première fois (dans les années 1870), elle signifiait manifestations, émeutes, soulèvements, interprétés comme des actions symboliques destinées à gagner une publicité utile plutôt que des succès immédiats. L’essentiel était que la propagande ne consiste pas seulement en paroles sur ce qui devait être fait mais aussi en informations sur ce qui s’était passé. Cela ne signifiait pas à l’origine et ne signifie toujours pas violence, encore moins assassinat ; mais, après la vague d’attentats anarchistes dans les années 1890, la propagande par le fait a été identifiée dans l’esprit populaire à des actes personnels de violence, et cette image ne s’est pas encore effacée.

Cependant, pour la plupart des anarchistes aujourd’hui, la propagande par le fait est plutôt de nature non violente, ou au moins sans violence, et s’oppose aux bombes plutôt qu’elle ne les défend. Elle est en fait revenue à sa signification première, bien qu’elle ait tendance actuellement à prendre différentes formes — « sit-ins », grèves sur le tas, occupations, chahuts organisés et manifestations sauvages. La propagande par le fait n’est pas nécessairement illégale, mais elle l’est souvent. La désobéissance civile est un type particulier de propagande par le fait qui implique l’infraction ouverte et délibérée aux lois pour attirer l’attention. Beaucoup d’anarchistes ne l’aiment guère, parce que c’est une provocation délibérée à la répression, ce qui est contraire au principe anarchiste d’éviter tout contact volontaire avec les autorités ; mais à certains moments les anarchistes ont trouvé que la désobéissance civile était une forme utile de propagande.

L’agitation, surtout quand elle réussit, et la propagande par le fait, surtout quand elle est illégale, vont beaucoup plus loin que la simple propagande. L’agitation incite à l’action, et la propagande par le fait implique l’action ; c’est là que les anarchistes entrent dans le domaine de l’action, et que l’anarchisme devient une chose sérieuse.

L’action

Le passage de la théorie anarchiste à son application pratique exige un changement de l’organisation. Le groupe typique de discussion ou de propagande, qui est facilement ouvert à la participation extérieure et à l’observation par les autorités, et qui est fondé sur la libre action de chacun, devient plus exclusif et plus formel. C’est un moment dangereux, puisque une attitude trop rigide conduit à être autoritaire et sectaire, tandis qu’une attitude trop lâche conduit à être confus et irresponsable. C’est encore plus dangereux du fait que, dès que l’anarchisme devient une chose sérieuse, les anarchistes deviennent une sérieuse menace pour les autorités, et que la vraie persécution commence.

La forme habituelle d’action anarchiste est l’agitation en particulier en participant à une campagne. Celle-ci peut être réformiste, lutter pour quelque chose qui ne changera pas tout le système, ou révolutionnaire, pour un changement du système lui-même ; elle peut être légale ou illégale, ou les deux à la fois, violente, non violente, ou simplement sans violence. Elle peut avoir une chance de réussir ou aucune dès le départ. Les anarchistes peuvent être des acteurs importants ou même les acteurs principaux de cette campagne, ou ils peuvent simplement être un des nombreux groupes qui y participent. On pense tout de suite à une grande variété de possibilités d’action, et depuis un siècle les anarchistes les ont toutes essayées. La forme d’action qui a été la plus heureuse et la plus typique est l’action directe.

L’idée de l’action directe est elle aussi souvent mal comprise, tant par les anarchistes que par leurs adversaires. Lorsque cette expression fut utilisée pour la première fois (dans les années 1890), elle ne signifiait pas autre chose que le contraire de l’action « politique » — c’est-à-dire parlementaire — ; et dans le contexte du mouvement ouvrier, cela signifiait action « industrielle », en particulier grèves, boycottage et sabotage, que l’on voyait comme des préparations et des répétitions de la révolution. L’essentiel était que l’action ne soit pas effectuée indirectement par des représentants mais directement par ceux qui sont les plus étroitement englobés dans une situation, qu’elle porte directement sur cette situation, et qu’elle soit destinée à aboutir à un certain succès plutôt qu’à une simple publicité.

Cela pourrait sembler assez clair, mais on a souvent confondu l’action directe avec la propagande par le fait et surtout avec la désobéissance civile. En réalité, la technique de l’action directe a été développée dans le mouvement syndicaliste français en réaction contre les techniques extrémistes de la propagande par le fait ; plutôt que de se laisser entraîner à des mouvements spectaculaires mais inefficaces, les syndicats avancèrent dans le travail terne mais efficace du moins en théorie. Mais à mesure que le mouvement syndicaliste croissait et entrait en conflit avec le système en France, en Espagne, en Italie, aux États-Unis et en Russie, l’action directe se mit à prendre la même fonction que les actes de propagande par le fait. Puis, lorsque Gandhi donna le nom d’action directe à ce qui était en fait une forme non violente de désobéissance civile, les trois phases se confondirent et finirent par signifier presque la même chose — toute forme d’activité politique qui s’oppose à la loi ou du moins se place en dehors des règles constitutionnelles.

Toutefois, pour la plupart des anarchistes, l’action directe garde son sens originel, quoiqu’à côté des formes traditionnelles elle en adopte de nouvelles — occupation de bases militaires, d’universités, de maisons inhabitées, d’usines, par exemple. Ce qui la rend particulièrement attrayante, c’est qu’elle est adéquate aux principes libertaires autant qu’à, elle-même. La plupart des formes d’action politique par des groupes d’opposition ont polir but de prendre le pouvoir : quelques groupes utilisent les techniques de l’action directe, mais dès qu’ils prennent le pouvoir ils les abandonnent et de plus interdisent à d’autres groupes de les utiliser. Les anarchistes sont partisans de l’action à tous moments ; ils y voient l’action naturelle, l’action qui se renforce elle-même et augmente à mesure qu’on l’utilise, l’action qui peut être employée pour créer et faire vivre une société libre.

Mais il y a des anarchistes qui ne croient pas en la possibilité de créer une société libre, et par conséquent leurs actions diffèrent de celles ci-dessus. Une des tendances pessimistes les plus fortes dans l’anarchisme est le nihilisme. Ce mot fut créé par Tourguéniev (dans son roman Pères et fils) pour décrire l’attitude sceptique et méprisante des jeunes populistes russes il y a un siècle, mais il se mit à signifier le point de vue qui dénie toute valeur non seulement à l’État ou la morale dominante, mais à la société et à l’humanité même ; pour le nihiliste rigoureux, rien n’est sacré, pas même lui — ainsi il fait un pas de plus que l’égoïste le plus convaincu.

Une forme extrême d’action inspirée par le nihilisme est le terrorisme pour lui-même plutôt que par revanche ou par propagande. Les anarchistes n’ont pas le monopole de la terreur, mais elle a souvent été très prisée dans quelques sections du mouvement. Après l’expérience frustrante que représente le prêche d’une théorie minoritaire dans une société hostile ou souvent indifférente, il est tentant d’attaquer physiquement cette société. Cela ne peut pas changer grand-chose à l’hostilité, mais cela empêchera sûrement l’indifférence ; qu’ils me haïssent pourvu qu’ils me craignent, voilà la ligne de pensée terroriste. Mais si l’assassinat raisonné a été improductif, la terreur au hasard a été contre-produisante, et ce n’est pas trop dire que rien n’a causé plus de tort à l’anarchisme que le courant de violence psychopathe qui l’a toujours traversé et le traverse encore.

Une forme atténuée d’action inspirée par le nihilisme est la bohème, qui est un phénomène constant même si son nom semble changer à. chacun de ses avatars. Elle aussi a été prisée dans quelques sections du mouvement anarchiste, et bien sûr aussi en dehors. Au lieu d’attaquer la société, le bohème s’en échappe — quoique, tout en vivant sans se conformer aux valeurs de cette société, il vit en général par elle et en elle. On a dit beaucoup de bêtises à ce sujet. Les bohèmes peuvent être des parasites, mais c’est vrai de bien d’autres gens. D’autre part, ils ne font de mal à personne, sauf à eux-mêmes, ce qui n’est pas vrai de pas mal de monde. Ce qu’on peut dire de mieux à leur sujet, c’est qu’ils peuvent faire du bien en s’amusant et en mettant en question les idées reçues d’une manière ostentatoire mais innocente. Ce qu’on peut dire de pire, c’est qu’ils ne peuvent pas réellement changer la société et risquent de perdre leur énergie en essayant de le faire ; or, pour beaucoup d’anarchistes, c’est là le problème central de l’anarchisme.

Une manière plus adéquate et constructive de s’évader de la société, c’est de la quitter et d’organiser une nouvelle communauté autarcique. A certains moments, cela a été un phénomène très répandu, parmi des enthousiastes religieux au Moyen-Age, par exemple, et parmi différents groupes plus récemment, en particulier en Amérique du Nord et en Palestine. Les anarchistes ont été touchés par cette tendance autrefois, mais plus guère aujourd’hui ; comme les autres groupes de gauche, ils préfèrent organiser leur propre communauté informelle, basée sur un noyau de gens vivant et travaillant ensemble à l’intérieur de la société, plutôt que d’en sortir. On peut y voir le noyau d’une nouvelle forme de société grandissant à l’intérieur des vieilles formes, ou bien une forme viable de refuge contre les exigences de l’autorité, acceptable pour le commun des mortels.

Il y a une autre forme d’action basée sur une vue pessimiste de l’avenir de l’anarchisme, c’est la protestation permanente. Selon ce point de vue, il n’y aucun espoir de changer la société, de détruire le système étatique, ni de mettre l’anarchisme en pratique. L’important n’est pas l’avenir, l’adhésion stricte à un idéal fixé et l’élaboration soignée d’une belle utopie, mais le présent, la reconnaissance tardive d’une amère réalité et la résistance constante à une situation affreuse. La protestation permanente est la théorie de beaucoup d’anciens anarchistes qui n’ont pas renoncé à ce qu’ils croyaient mais n’ont plus d’espoir de réussir ; c’est aussi la pratique de beaucoup d’anarchistes actifs qui gardent intact ce à quoi ils croient et continuent comme s’ils espéraient toujours réussir, mais qui savent consciemment ou inconsciemment qu’ils ne verront jamais le succès. Ce que les anarchistes ont fait au siècle dernier peut être décrit comme une protestation permanente, quand on regarde en arrière ; mais c’est tout aussi dogmatique de dire que rien ne va jamais changer que de dire que tout doit inévitablement changer, et personne ne peut dire si la protestation deviendra efficace, et si le présent va soudain nous devancer. La distinction réelle tient à ce que la protestation permanente est considérée comme action d’arrière-garde dans un cas sans espoir, tandis que la plus grande partie de l’activité anarchiste est vécue comme une action d’avant-garde, ou au moins d’éclaireur, dans un combat que nous pouvons ne pas gagner et qui peut ne jamais finir, mais qui vaut toujours la peine d’être mené.

Les meilleures tactiques dans ce combat sont celles qui sont conformes à la stratégie générale de la guerre pour la liberté et l’égalité, depuis les escarmouches de guérilla dans la vie privée jusqu’aux batailles rangées dans les plus grandes luttes sociales. Les anarchistes sont presque toujours une petite minorité, ils ont donc rarement le choix du champ de bataille, mais ils doivent combattre partout où il y a de l’action. En général, les occasions les plus réussies ont été celles où l’agitation des anarchistes a conduit à leur participation à de plus larges mouvements de gauche — en particulier dans le mouvement ouvrier, mais aussi dans des mouvements antimilitaristes ou même pacifistes dans des pays se préparant à des guerres ou y participant, dans des mouvements anticléricaux ou humanistes en pays religieux, des mouvements pour la libération nationale ou coloniale, pour l’égalité raciale ou sexuelle, pour la réforme légale ou pénale, ou pour les libertés civiles en général.

Une telle participation implique inévitablement une alliance avec des groupes non anarchistes et certains compromis, et ceux qui s’engagent profondément dans de telles actions courent toujours le risque d’abandonner même l’anarchisme. D’autre part, refuser de courir ce risque signifie en général stérilité et sectarisme, et il semble que l’influence du mouvement anarchiste a toujours été proportionnelle à son engagement. La contribution particulière des anarchistes dans de telles occasions a deux aspects — insister sur le but d’une société libertaire, et insister pour que des méthodes libertaires soient utilisées pour y parvenir. C’est en fait une seule contribution, car ce que nous pouvons suggérer de plus important n’est pas seulement que la fin ne justifie pas les moyens, mais aussi que les moyens déterminent la ‘ fin — les moyens sont des fins, dans la plupart des cas. Nous pouvons être sûrs de nos propres actions, mais pas de leurs conséquences.

Les anarchistes trouvent une bonne occasion de donner à la société un élan vers l’anarchisme : c’est la participation active sur de telles bases à des mouvements non sectaires comme le Mouvement du 22 mars en France, le SDS en Allemagne, les Provos en Hollande, le Comité des 100 en Angleterre, les Zengakuren au Japon, et les différents groupes pour les droits civiques, la résistance à la guerre et pour le pouvoir étudiant aux États-Unis. Autrefois, la meilleure occasion pour un mouvement réel vers l’anarchisme était bien sûr dans es épisodes de syndicalisme militant en France, en Espagne, en Italie, aux États-Unis et en Russie, et par-dessus tout dans les révolutions russe et espagnole ; aujourd’hui, elle ne réside plus tellement dans les révolutions violentes et autoritaires d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine, mais plutôt dans des soulèvements insurrectionnels comme ceux de Hongrie en 1956 et de France en 1968.


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