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Le Cri du Peuple, numéro du 22 juillet 1931 : Emile Pouget

jeudi 15 septembre 2022

Une pénible nouvelle nous parvient : le Père Peinard est mort.

descriptif

Ce nom qui ne dit peut-être pas grand’chose aux militants d’aujourd’hui évoquera à tous ceux d’avant-guerre une foule de souvenirs. C’est que Pouget fut, avec Griffuelhes, la figure la plus représentative du syndicalisme révolutionnaire de la grande période.

Pouget tint la plume pour toute la pléiade de militants d’alors, en sa qualité de secrétaire de rédaction de la Voix du Peuple, de 1900 à 1908. Une plume vigoureuse et expérimentée. Il fallait qu’elle le fût pour que le syndicalisme révolutionnaire, avec un simple hebdomadaire, tint le coup devant le socialisme parlementaire et son quotidien d’alors, la Petite République, tirant sur lui à boulets rouges.

En Pouget se rejoignaient les qualités d’un grand journaliste populaire et une longue expérience de militant révolutionnaire.

En 1883 — il avait alors 23 ans — il avait participé à la manifestation de chômeurs des Invalides et avait été condamné pour ce fait, avec Louis Michel, à 8 ans de réclusion. Il ne devait faire que trois ans à Clairvaux, une amnistie étant intervenue. Libre, il commençait la publication du Père Peinard, qu’il poursuivait jusqu’en 1894, où, échappant aux pattes des policiers et coupant au procès des Trente, il passait en Angleterre. Son anarchisme avait toujours été lié étroitement aux préoccupations et aux luttes journalières des travailleurs. Aussi comprend-on facilement que Pouget, qui avait fondé, vers la vingtaine d’années, le premier syndicat d’employés de magasins parisien, se trouvât vers la quarantaine, à la tête de la CGT.

Son rêve était de doter le mouvement révolutionnaire d’un quotidien. Il crut pouvoir le réaliser en 1908, quand il fonda la Révolution. L’insuccès de ce quotidien l’affecta beaucoup. Il survenait, il est vrai, en pleine crise grave de la CGT. Après Villeneuve-Saint-Georges, le gouvernement tenta, par tous les moyens, de briser la force montante du syndicalisme. Il ne put la briser, mais il réussit à l’affaiblir. Ce fut l’amer découragement pour d’aucuns, le repliement pour d’autres.

Pouget fut de ces derniers. Mais son souvenir ne s’effacera pas. Même. quand ceux qui l’ont aimé et connu ne seront plus là, son nom demeurera gravé dans l’histoire de la CGT et du mouvement ouvrier français.


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