Accueil > Editions & Publications > Volonté anarchiste > 16-17 - Histoire du mouvement libertaire en Bulgarie (Esquisse) - G. Balkanski > Dr Ivan Balev (1900-1981)

Dr Ivan Balev (1900-1981)

dimanche 28 janvier 2024, par Georges Balkanski (CC by-nc-sa)

Né à Pavel-Bania, le 27 mars 1900, d’une famille paysanne modeste, Ivan Balev fit ses études secondaires à Kazanlik, chef-lieu d’un district où l’influence libertaire était particulièrement forte, et il adhéra au mouvement anarchiste. Ensuite, il se rendit à Vienne (Autriche) pour étudier la médecine, et se spécialisa à Paris de 1926 à 1931.

D’une excellente santé, doué d’une grande capacité de travail et d’assimilation rapide des idées, il acquit une large culture générale.

Comme médecin-chirurgien, orthopédiste et généraliste, il était profondément attaché à sa profession et à ses malades qui l’aimaient beaucoup pour sa bonté et son extrême dévouement. Devenu très populaire pas sa compétence, les malades venaient de loin à Pavel-Bania, station thermale réputée, pour se faire soigner par lui.

Nommé par la suite assistant du premier chirurgien de Bulgarie, l’anarchiste professeur Paraskev Stoyanov, Balev devint aussi un chirurgien réputé. Des hommes politiques, de grands artistes et même des militaires soviétiques s’adressaient à lui pour des opérations délicates. Il sauva la vie à des centaines de malades. Comme chirurgien, il avait ses propres méthodes d’opération, en particulier pour les ulcères de l’estomac.

Auteur de nombreux ouvrages et assistant à l’hôpital universitaire de Sofia, Balev était le médecin le plus qualifié pour occuper la chaire de son célèbre maître et camarade, le professeur Stoyanov, devenue vacante. Mais ses activités de militant libertaire lui valurent des persécutions.

Dr Ivan Balev

Arrêté deux jours avant le Ve congrès du Parti communiste, en décembre 1948, avec d’autres militants libertaires, plus de six cents, il lui fut intenté un procès monté de toutes pièces. Détenu à la Sûreté nationale, interrogé et torturé pendant plus de quatre mois, on l’amena sous forte escorte avec huit autres militants au palais de justice, bloqué par la police. Le procès eut lieu à huis-clos. Les professeurs de la Faculté de médecine se présentèrent volontairement pour témoigner en sa faveur, exaltant ses qualités de grand chirurgien et d’homme de haute morale anarchiste. En vain ! Il fut condamné arbitrairement à trois ans de privation de liberté. Dans la prison, utilisé comme médecin, il se dépensa à soigner les malades qui gardent de lui des souvenirs reconnaissants, inoubliables.

Même en tant que prisonnier, il ne cessa jamais de lutter contre le régime. Dans une conférence aux détenus que l’administration pénitentiaire lui demanda sur « l’Homme nouveau », il présenta un modèle entièrement différent des hommes du parti. Il fut immédiatement puni de privation de correspondance avec sa famille, et de droit de recevoir des colis.

Après la prison, il fut interné au camp de concentration de Béléne pour de longues années. Chargé de soigner les malades, il faisait tout son possible pour les protéger. Mais s’apercevant que l’administration pénitentiaire n’accomplissait pas ses prescriptions, il protesta et refusa de continuer à exercer la médecine, préférant se rendre aux chantiers et travailler comme tous concentrationnaires.

Le médecin Balev était aussi un homme public, militant libertaire, militant coopérateur, orateur, conférencier, etc. Jouissant d’une grande grande confiance de l’Union des Coopérateurs, il fut chargé d’une mission spéciale pendant qu’il se spécialisait à Paris. Ces deux activités ne l’empêchaient nullement de rendre service à ses camarades persécutés qui se réfugiaient à l’étranger : trois d’entre eux se servirent de son passeport.

Sa popularité dans le district de kazanlik lui valut la proposition de l’opposition au régime de le présenter comme candidat aux élections législatives, mais fidèle à ses conceptions il refusa cet honneur.

Malgré sa forte constitution physique, son inépuisable énergie, les souffrances encourues pendant toute la période de dictature bolchevique raccourcirent sa vie. Il s’éteignit le 31 mai 1981 dans sa ville natale où, jusqu’à son dernier souffle, il continua à soigner ses nombreux patients.

A la mort du docteur Balev, le mouvement libertaire bulgare, représenté par la Fédération anarchiste communiste de Bulgarie, perd l’un de ses meilleurs militants.