Accueil > PARTAGE NOIR - Brochures > Allemagne > Augustin Souchy 2 - Attention : anarchiste ! > [16] Augustin Souchy - 1921 : en France, au pays de la Commune

[16] Augustin Souchy - 1921 : en France, au pays de la Commune

dimanche 26 avril 2020, par Augustin Souchy (CC by-nc-sa)

1921 : en France, au pays de la Commune

Lors d’une fête commémorative de la Commune de Paris, à Berlin en 1911, qui se termina sur la chanson : Ni maître ni valet, va de ville en ville, liberté, droits de l’homme sont les mots d’ordre, plus d’un déjà crient hardiment : Vive la Commune, je m’étais proposé d’aller étudier le mouvement social dans la patrie même des théories sociales modernes. Mais des raisons personnelles et surtout la Première Guerre mondiale et ses suites me forcèrent à ajourner ce projet. Ce n’est qu’en 1921 que je pus le réaliser. Je partis pour Paris en février de cette année-là. Le 20 mai, je pris part à la marche funèbre qui avait lieu tous les ans au cimetière du Père Lachaise, en hommage aux combattants de la Commune tombés au Mur des Fédérés. Ce cinquantième anniversaire de la Commune fut particulièrement célébré car la Commune de Paris comptait comme l’événement le plus notoire de l’histoire du mouvement Ouvrier du siècle passé.

Le 18 mars 1571, des hommes et des femmes inspirés par les idées socialistes voulurent mettre fin à la misère nationale résultant de la défaite française. Ils déclarèrent Paris commune libre — il y eut de semblables événements à Lyon et dans d’autres villes françaises — et projetèrent de transformer l’État centralisé de la France en une fédération de communes autonomes entre elles. Les combattants de ce renouveau national prirent le nom de communards et la guillotine, symbole de la Terreur de Robespierre sous la Révolution de 1789, fut enlevée du musée et brûlée — comme une marque d’infamie pour la nation. La Colonne de la Victoire, sur la place Vendôme, érigée en l’honneur des guerres napoléoniennes fut abattue en tant que symbole du militarisme. Mais la Commune fit plus : elle rabaissa le traitement maximal des hauts fonctionnaires, abolit le travail de nuit des boulangers, instaura la séparation de l’Église et de l’État (ce qui signifiait la fin des cours de religion dans les écoles publiques) et assura la conversion des entreprises privées en coopératives. C’était le début d’un travail de réformes qui devait conduire à la régénération sociale.

Le pouvoir conservateur chercha par tous les moyens, compris les plus sanglants, à écraser la Commune et y réussit finalement. Le massacre se termina le 20 mai 1871. Des milliers de communards furent fusillés contre le mur du cimetière du Père Lachaise, plusieurs centaines condamnés au cachot ou à la déportation. Les réformes de la Commune furent annulées. La période de réaction dura plus d’une décennie. Mais on ne put empêcher la marche du progrès : le 19 décembre 1905, la séparation de l’Église et de l’État, introduite la première fois par la Commune fut définitivement entérinée ; depuis cette date, il n’y a plus d’impôts ecclésiastiques ni de cours de religions dans les écoles publiques en France [1].


[1L’optimisme d’Augustin Souchy (il écrit ses Mémoires en 1976) n’est plus de mise. Si la loi de blasphème n’existe pas encore en France, l’Église est largement subventionnée par l’État, les régions, les départements et les communes. De même la puissance des médias chrétiens contrebalance l’absence d’enseignement religieux à l’école publique. Signalons enfin que la loi de séparation de l’Église et de l’État ne s’applique pas en Alsace et en Lorraine (NDE).