Nous avons dit que la nouvelle méthode d’action révolutionnaire entreprise par les ouvriers métallurgistes de prendre possession des usines, si elle était suivie par toutes les autres catégories de travailleurs, de la terre, des mines, du bâtiment, du chemin de fer, des dépôts de marchandises de tout genre, des moulins, des fabriques de pâtes alimentaires, des magasins, des maisons, etc., amènerait la révolution, qui se ferait même sans répandre une seule goutte de sang.
Et ce qui semblait être jusqu’à hier un rêve, commence aujourd’hui à être une chose possible, étant donné l’état d’âme du prolétariat et la rapidité par laquelle les initiatives révolutionnaires se propagent et s’intensifient.
Mais cet espoir que nous avons ne signifie pas que nous croyons au repentir des classes privilégiées et à la passivité du gouvernement. Nous ne croyons pas aux déclins paisibles. Nous connaissons toute la rancœur et toute la férocité de la bourgeoisie et de son gouvernement. Nous savons qu’aujourd’hui, comme toujours, les privilégiés ne renoncent que s’ils sont obligés par la force ou par la peur de la force. Et si pour un instant nous pouvions l’oublier, la conduite quotidienne et les propos exprimés tous les jours par les industriels et par le gouvernement avec leurs gardes royales, leurs carabiniers, leurs sbires soudoyés en uniforme ou non, sont là pour nous le rappeler. Il y aurait là pour nous le rappeler, le sang des prolétaires, le sang de nos camarades assassinés.
Mais nous savons aussi que le plus violent des tyrans devient bon s’il a la sensation que les coups seront tous pour lui.
Voilà pourquoi nous recommandons aux travailleurs de se préparer à la lutte matérielle, de s’armer, de se montrer résolus à se défendre et à attaquer.
Le problème est, et reste, un problème de force.
La phrase sans une seule goutte de sang, prise au pied de la lettre, restera, malheureusement !, une façon de dire. Mais il est certain que plus les travailleurs seront armés, plus ils seront résolus à ne s’arrêter devant aucune extrémité, et moins la révolution répandra de sang.
Cette noble aspiration de ne pas répandre de sang ou d’en répandre le moins possible, doit servir comme encouragement à se préparer, à s’armer toujours plus. Parce que plus nous serons forts et moins de sang coulera.