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Paul Robin (1837-1912) [05]

mercredi 18 novembre 2020, par Victor Méric - Flax (Domaine public)

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L’avortement est une opération dangereuse. De plus c’est un crime.

Voilà la grande objection.

Eh bien, non ! L’avortement est une opération comme les autres, pas plus dangereuse que les autres. Nous sommes à une époque où, pour un oui et pour un non, on vous ouvre le ventre, on vous troue la boite crânienne, on vous perfore la poitrine. Est-ce que ces opérations ne sont pas dangereuses et quelqu’un songe-t-il à s’en indigner ? Est-ce que, d’ailleurs, l’avortement n’est pas pratiqué, dans certains cas, dans les hôpitaux, lorsque la mère, par exemple, est en danger de mort ; lorsqu’elle est syphilitique, tuberculeuse, ou mal conformée ? Il ne reste qu’à joindre à ces cas spéciaux, le cas de misère pour que l’avortement entre dans les mœurs. Et puis, considérez certains accouchements normaux et demandez aux docteurs s’ils ne sont pas plus périlleux que les avortements méthodiquement pratiqués ?

Un crime ? Ah ! voilà bien un résultat de l’épouvantable éducation catholique. Un crime ? Pourquoi ? L’embryologie ne nous a-t-elle pas montré, en détail, le processus que suit le germe vivant, depuis le moment où, « spermatozoïde aveugle dans l’ovaire », il aborde amicalement, sur la route de l’utérus, l’ovule féminin jusqu’au jour où constitué définitivement, il apparaît à la lumière, après avoir assumé, tour à tour, différentes formes animales. A quel moment, le crime ? Est-ce quand l’enfant futur se présente sous l’aspect d’une larve informe ou lorsqu’il affecte la forme , réjouissante d’un lapin ? Oui, à quel moment ? Une heure après le coït ou six mois plus tard ? Bien malin qui le dirait. Ou alors, il faut pousser le raisonnement jusqu’à ses extrêmes conséquences, c’est-à-dire placer le crime au moment précis de l’éjaculation, quand la substance précieuse se répand. Et de ce fait voilà Charlot qui en s’amusant devient un assassin. Et voici également que, comme au temps de Molière,

La pédérastie est un cas,
Est un cas pendable.

Le crime ne peut exister, en réalité, qu’a partir de l’instant où l’enfant vivant et jetant son premier cri, apparaît. Il est au monde. On n’a plus le droit de le supprimer. Mais avant ? pendant les neuf mois de laborieuse gestation, alors que ce qui sera un homme n’est pas même encore un animal et vit d’une vie plutôt végétale, il y aurait crime à supprimer cette chose ? Il est vraiment effarant d’avoir encore à discuter de pareilles puérilités.