Premier Raisonnement
Le Monde est à feu et à sang.
C’est criminel et c’est une imbécillité.
De cet état de choses il y a des responsables, des coupables, beaucoup de coupables : ce sont tous ceux qui ont retardé, par leur bas égoïsme, le progrès social ; tous ceux qui ont obligé les hommes à être en état perpétuel de guerre ; tous ceux qui, par inconscience, par entêtement ou par intérêt, ont divisé le peuple ; tous ceux, enfin, qui ont combattu, de face ou de dos, les rébellions et les révolutions sociales ; tous ceux qui, « chefs » reconnus, respectés, ont menti, trompé, trahi leurs troupes.
Mais, avant les hommes, il y a les systèmes, c’est-à-dire l’organisation sociale (celle-ci fait comprendre, mais non pardonner ceux-là).
Le coupable initial de la situation où les peuples se trouvent aujourd’hui : du système fasciste au communisme, en passant par tous les systèmes politiques, c’est la Forme. C’est la Forme qui permet à une minorité d’individus de gouverner une Enormité d’autres hommes. C’est la Forme qui fait d’une classe de non producteurs les dirigeants de la production. C’est elle, encore, qui fait que le régime se rattachant à un bord ou à un autre (noir, blanc ou rouge) conserve exactement les mêmes institutions, le même mécanisme : « gouvernement central » avec fonctionnarisme rongeur, Armée, Police, Magistrature, ce qui veut dire : ordres mal conçus et contradictoires, paperasserie inutile, forces destructives, mesures arbitraires, justice partiale.
C’est la Forme qui fait que tous les gouvernements de toutes les nations hurlent à la Paix mais préparent la Guerre.
C’est la Forme qui fait que tous les gouvernants jurent de supprimer dans leurs pays respectifs le paupérisme, mais ne font que changer les privilèges de mains.
En toute logique il en résulte que, dans le cataclysme que nous subissons, il ne peut y avoir de nations préférées, pas de gouvernements préférés. Il y a des coupables et des victimes.
Coupables : les Formes et les Hommes qui créent et commandent la guerre.
Victimes : tous les gouvernés qui font (contre leur gré) la guerre.
Coupables : tous les gouvernants qui font la loi.
Victimes : tous ceux qui la subissent.
Non, nous ne souhaitons pas la victoire d’un pays sur un autre pays. La prise par un peuple du territoire, fumant de ruines et puant le cadavre, d’un autre peuple, ne représente à nos yeux qu’une double défaite : mort et destruction.
Notre préférence et notre aide ne peuvent aller qu’aux peuples qui brisant les chaînes du passé, brisant la Forme et ses souteneurs, se décideront enfin à vivre suivant les conseils de leurs expériences et de leur Raison.
Pas un homme, dit civilisé, n’approuve l’exploitation de l’homme par l’homme. La raison de chacun crie à l’injustice à la vue de la misère des uns et de la richesse des autres.
Pourquoi alors, l’homme dit civilisé est entraîné à faire les guerres les plus meurtrières, les plus destructrices, les plus longues, qui n’ont plus, aujourd’hui, comme limites que celles du monde lui-même, au moment précis où son intelligence en sent l’absolue absurdité ?
Pourquoi l’homme dit civilisé exploite-t-il plus durement son semblable, au moment où sa conscience le lui interdit le plus formellement ?
Pourquoi notre Raison à tous dit que nous vivons follement, que nos gouvernants – tous nos gouvernants – furent et sont cruels et sots ? Pourquoi continuons-nous dans le chemin de l’erreur et de la folie, quand nous reconnaissons nos erreurs et nos folies ?
Combien de centaines, de milliers, de millions d’hommes se posent journellement ces « Pourquoi » ! Combien cherchent une solution ?
Combien d’hommes généreux ont donné tout : travail, famille, santé, liberté, vie, pour faire sortir l’humanité de cette ornière !
Combien de merveilleuses idées sont sorties de ces cerveaux fraternels, porteurs de germes de Liberté, de Justice, de Vérité, de Progrès ! Combien de ces idées ont même envahi le monde !
Et, jusqu’à nos jours, tous ces élans, tous ces efforts restèrent vains. Les meilleures idées furent tronquées par des fripouilles qui s’en étaient emparées.
A qui la faute ?
A tous ceux, parmi tant d’autres, qui ont voulu appliquer des Idées Neuves, dans des temps nouveaux, avec des vieilles méthodes, déjà révélées fausses aux temps anciens.
Chaque révolution a enlevé le Pouvoir de quelques mains pour le remettre aussitôt entre d’autres, oubliant que le Pouvoir est corrupteur en soi-même, qu’il fait d’un révolutionnaire, d’abord : un fonctionnaire, ensuite un réactionnaire.
Oubliant qu’il n’est pas possible qu’un ou plusieurs hommes dirigent, organisent, assurent, dans les moindres détails, la vie de millions d’individus ; oubliant qu’un homme au pouvoir perd toute notion de la vie sociale, car pour gouverner, il faut quitter l’usine, le champ, le laboratoire ou n’y avoir jamais mis les pieds ; oubliant que la Justice, la Vérité, ne sont pas des Dogmes, mais des choses variables suivant les lieux, les temps, les circonstances ; qu’imposées elles deviennent Injustice et Erreur.
C’est pourquoi, nous voyons que ceux qui font les lois, les rendent plus mauvaises encore en les appliquant, et ne se gênent pas de les contourner.
Ils sont légion, les grands coupables dans nos sociétés modernes !
Nous avons, d’abord, les Profiteurs : forbans d’industrie ou de finance, qui, sans pitié, sans conscience, sans humanité, exploitent à mort ou font massacrer entre eux leurs semblables pour augmenter leurs bénéfices.
Viennent ensuite leurs valets : les Politiciens.
Impossible de dresser la liste de tous les parjures, caméléons, renégats, arrivistes, etc. Il y en a trop.
Alors, direz-vous, plus d’idées directrices, plus d’hommes directeurs ? Qui ou quoi va diriger le monde ?
C’est à cette question précisément, que notre brochure va répondre.
Des mots, dites-vous ? Non, des idées pratiques. Une organisation rationnelle, basée sur la liberté de chacun, respectant celle de tous, fondée sur la fraternité effective, sur la vérité expérimentale, sur la Justice sociale s’exerçant par la raison populaire.
C’est la disparition à jamais des régimes d’oppression, d’ignorance, d’inconscience, dans lesquels nous vivons.
C’est l’organisation nouvelle, hors de tous cadres passés ; elle ouvre la porte :
A la Raison, à l’Intelligence, au Travail, à la Paix totale et indéfinie.